Par ClĂ©ment đ«
Parce que je trouve son Ćuvre dâune justesse absolue et dâune beautĂ© simple, je vous prĂ©sente aujourdâhui Helena Almeida.đ
Helena Almeida (1934-2018) est une artiste portugaise nĂ©e Ă Lisbonneđ”đč. Elle travaille dĂšs son plus jeune Ăąge dans lâatelier de son pĂšre et pose pour lui pendant des heures. Avec le temps, lui vient la sensation que son corps ne lui appartient plus, qu'il n'est plus quâau service de la peinture de son pĂšre.đšâđš Câest dans ce mĂȘme atelier quâelle va produire la plupart de ses Ćuvres avec lâidĂ©e de sâĂ©manciper du cadre. Photographie principalement, mais aussi peinture, sculpture, dessin et performance, elle pratique un art qui transcende les catĂ©gories.
Son sujet principal est son propre corps. Elle dit : « Je suis moi et mon Ćuvre. Ma peinture est mon corps, mon Ćuvre est mon corps ». Mais elle ne parle jamais dâautoportrait et, mĂȘme si son oeuvre semble politiquement trĂšs fĂ©ministe elle ne se revendique pas comme telle.
Sa maniĂšre de travailler est trĂšs ritualisĂ©e. Elle commence dâabord Ă dessiner ce quâelle va faire. Ensuite elle transpose ses dessins en performance que son mari, Artur Rosa, vient capter en vidĂ©o ou en photographie. đčđž Son obsession tourne autour du corps en action qui occupe lâespace. Elle crĂ©e des chorĂ©graphies quâelle vient produire ensuite dans le rĂ©el, dans son atelier. Elle performe pour elle-mĂȘme, ou plutĂŽt pour lâimage intelligemment captĂ©e pour fractionner le corps, afin de nous laisser imaginer le reste.
đŠ¶Comme dans la performance, Sans titre en 2010, quâelle rĂ©alise avec son mari. Leurs jambes attachĂ©es avec un fil de fer, ils se mettent Ă marcher tels des siamois claudicants, durant 18 minutes dans lâatelier de lâartiste. Le cadrage resserrĂ© au niveau des jambes permet dâaccentuer la tension et la difficultĂ© dâune marche vouĂ©e Ă lâĂ©chec. Au lieu de nous dĂ©voiler la totalitĂ© des corps, elle sĂ©lectionne ce qui, pour elle, suffit Ă servir ses propos.đŠ”
đCâest le cas aussi de la performance Ouve-me (Ă©coute-moi) oĂč les mots «ouve-me» semblent cousus sur les lĂšvres de lâartiste, accentuant la sensation de mutisme imposĂ©. Des images dâHelena Almeida bĂąillonnĂ©e, suturĂ©e ou Ă©touffĂ©e par une toile contre laquelle elle presse sa bouche et ses mains, vĂ©hiculent un sentiment dâoppression. Les cadrages bien choisis, notamment sur la bouche, renforcent la puissance Ă©motionnelle de lâaction.đ«
Emprunt dâun certain mystĂšre, le travail d'Helena Almeida laisse libre cours Ă lâinterprĂ©tation. Le noir et blanc propre Ă ses photographies offre un travail subtil et Ă©minemment poĂ©tique sur lâespace et la relation intĂ©rieure et extĂ©rieure de la femme.
Reportage du Jeu de Paume : https://vimeo.com/156564104
OUVE ME (extrait) :
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